Mon corps...ma liberté ?
La contraception
Dans les années 1960, l’invention de la pilule contraceptive est une innovation importante pour les femmes : la maternité devient un choix. Elles peuvent désormais décider si elles veulent devenir mère ou non. La diffusion de la pilule est pourtant limitée au début : en 1969, seulement 10% des femmes la prennent et il est toujours interdit d’en faire la publicité. En effet, au même titre que les autres moyens de contraception, la pilule enraye le processus de natalité que le gouvernement essaye de favoriser. L’usage de la pilule est donc mal vu dès le départ. Toutefois, l’apparition du planning familial permet progressivement de mieux informer les femmes à son propos.
Avec la pilule, la reproduction et la sexualité sont également dissociés : la femme peut alors entretenir un tout autre rapport avec son corps. Ceci amorce une libération sexuelle de la femme. Si la sexualité est au départ un sujet tabou, elle s'ancre progressivement dans la culture quotidienne au point, parfois, de réduire la femme à un simple objet. Les féministes veulent alors lutter contre cette image véhiculée. Les Marie Mineur luttes contre l’exploitation du corps de la femme par la pornographie, la publicité ou le cinéma.
En 1971, le Front de libération des femmes (FLF), qui a vu le jour à l’Université libre de Bruxelles, cherche un moyen de marquer les esprits pour faire connaître leur organisation en dehors de l’université. Les féministes décident alors de perturber le concours de Miss Belgique. Etant donné que la finale a lieu à Anvers, le FLF décide d’associer les Dolle Mina à leur action. Le soir venu, les féministes font irruption dans la salle du concours, montent sur la scène et sur les chaises tout en distribuant au public les tracts dessinés par Adèle Hauwel. Danielle Colardyn scande sur scène “Non aux concours de beauté, nous ne sommes pas du bétail !”. L'action a l’effet escompté : les journaux, la radio et la télévision relaient massivement cet événement et les projecteurs se braquent sur le FLF.
L'avortement
En Belgique, l’avortement est puni par le code pénal de 1867. Toutefois, même si elle est illégale, l’IVG (interruption volontaire de grossesse) est pratiquée par de nombreuses femmes. L’avortement clandestin est une pratique dangereuse qui peut amener à des complications plus ou moins graves s'il n’est pas réalisé dans des conditions adéquates. Certaines femmes deviennent stériles et d’autres en meurent. Dans leur lutte, les femmes peuvent compter sur des juristes, qui trouvent absurde de maintenir une loi qui n’est pas appliquée ainsi que sur des médecins. Parmi ces derniers se trouve une figure marquante de la dépénalisation de l’avortement : Willy Peers. Il milite pour sa légalisation et pour que les femmes aient davantage accès aux moyens de contraception. En 1973, il est emprisonné pour avoir pratiqué illégalement 300 interruptions volontaires de grossesse. De nombreuses femmes en sont indignées : une pétition réclamant sa libération récolte 250.000 signatures ; des manifestations sont organisées. La même année, le législateur belge décide d'autoriser la publicité pour la contraception.
En 1976, la journée de la femme est consacrée à la dépénalisation de l’avortement. Elle prend la forme d’une manifestation avec comme slogan : “Avortement, les femmes décident”. Les femmes veulent avoir le choix de garder ou non l’enfant qu’elle porte. Des comités pour la dépénalisation de l’avortement voient également le jour et des centres extra-hospitaliers pour la pratique de l’IVG ouvrent : tel le Collectif contraception. Ce dernier peut compter sur le soutien financier des Pays-Bas qui ont du mal à gérer l'afflux croissant de femmes belges venant se faire avorter dans leur pays (11.000 en 1975).
Malgré ces initiatives et ces mouvements pour la dépénalisation de l’avortement, les femmes lutteront encore longtemps avant d’obtenir une avancée législative. Alors qu’en France, l’avortement est légalisé depuis 1975, il faut attendre 1990 pour la dépénalisation de l’IVG en Belgique avec la loi Lallemand-Michielsen. En effet, depuis 1970, des mouvements “pro-vie”, opposés à l’avortement, ont émergé en Belgique. Ceux-ci considèrent l’avortement comme un crime.