Résister à l'occupant
Face à l’occupant, des civils se révoltent, leur courage pouvant provenir d’une germanophobie héritée de la Première Guerre mondiale et d'un sentiment patriotique. Bien qu’une définition précise de la résistance soit toujours discutée par les spécialistes, différents réseaux aux sensibilités politiques plurielles se sont organisés avec un objectif commun : chasser l’occupant hors de Belgique.
"En septembre 1940, le 6 septembre, ma mère a fait 6 mois de prison parce qu’elle avait écouté Londres, insulté l’armée allemande en traitant un Allemand de "Schwein" et n’avait pas remis à la Kommandantur la plus proche les tracts jetés par les avions. Quand elle est sortie, elle était encore plus acharnée qu’avant !" témoigne Casimir Destombe*
Les premiers réseaux de résistance se mettent en place dès le début de l’occupation. Certains sont créés spontanément. D’autres naissent de l’incursion d’agents britanniques. D’autres encore sont des héritages de la Première Guerre, à l’instar du réseau Clarence. En 1940, la résistance est constituée de réseaux de renseignements, d’évasion et une presse clandestine est instaurée. Les premiers mois de l’occupation sont également marqués par des manifestations patriotiques telles que la commémoration du 11 novembre 1940.
Tout au long de l’occupation, les mouvements de résistance se développent. Ils gagnent en organisation et acquièrent de nombreux membres. Leur objectif premier est d’établir et maintenir une communication avec Londres où le gouvernement belge est en exil. Dès lors, ce dernier leur procure entre autres du matériel et des armes.
Durant l’année 1942, la politique d’occupation se durcit. La résistance réagit contre les persécutions envers les Juifs notamment par la création d’un Comité de défense des Juifs. L’instauration du travail obligatoire en Allemagne en octobre 1942 plonge de nombreux individus dans la clandestinité. Certains rejoignent donc la résistance.
L’année 1943 marque un tournant dans le déroulement du conflit avec entre autres la défaite allemande lors de la bataille de Stalingrad et la reddition de l’Italie. Ces évènements redonnent l’espoir d’une victoire prochaine pour la Belgique. La résistance devient de plus en plus armée. Les répressions envers la résistance sont également de plus en plus fréquentes.
Lors du débarquement en Normandie du 6 juin 1944, les résistants aident les troupes alliées et participent à la libération du pays. Ils parviennent à reprendre Anvers intacte malgré les dispositifs de destruction mis en place par les Allemands.
Les réseaux de résistance ont de nombreuses missions. Les réseaux d’évasion, notamment le réseau Comète, transfèrent via l’Espagne toute personne souhaitant se rendre en Grande-Bretagne, essentiellement des pilotes alliés dont l’avion a été abattu.
Les réseaux de renseignements, comme Bayard ou Clarence, transmettent à Londres des informations sur le déplacement de troupes ou sur la situation d’aérodromes, usines ou voies de communication qui sont des cibles idéales pour les bombardements alliés. Ils pouvaient également informer sur la présence de troupes allemandes.
Outre les réseaux d'évasion et de renseignements, la résistance joue également un rôle moral en publiant des journaux clandestins et des tracts. Cela sert de contrepoids à la propagande allemande. La presse est aussi utile pour le recrutement, qui se faisait habituellement par le bouche-à-oreille. Des réseaux mettent en place des œuvres humanitaires. Par exemple, Solidarité permet d’aider les familles des résistants du Front de l’Indépendance capturés par l’occupant.
"Je ne voulais qu’une chose : pas d’Allemands à la maison. Un jour, je devais aller chercher un jeune Belge, un grand journaliste qui avait abattu un flamingant, groupe belge plutôt porté pour les Allemands ; il était recherché depuis cette exécution et je devais le prendre à la frontière, je suis donc allée à Templeuve avec mon vélo, car mon vélo, c’était sacré, il n’y avait que cela qui marchait, mais quand j’ai répondu au mot de passe, c’était la Gestapo...", raconte Raymonde Marc**.
Contrairement à la résistance de la Première Guerre, la résistance de la Seconde Guerre mondiale est armée. Les résistants sabotent alors les voies de communication. Ainsi, la ligne Ottignies-Louvain est dégradée le 30 juillet 1943 par des partisans armés. Les détériorations des voies ferrées permettent entre autres d'éviter les déportations. Les câbles électriques peuvent également être touchés comme lors de la grande coupure provoquée par le Groupe G le 15 janvier 1944. Enfin, des attentats contre des collaborateurs sont commis.
La résistance reste minoritaire parmi les civils belges:
Au total, ce seraient 210 000 reconnaissances pour des faits de résistance qui auraient été administrées après le conflit.
Les résistants se retrouvent dans toutes les couches socioprofessionnelles de la population, à des proportions diverses.
Les actions des résistants s’élaboraient au péril de leur vie puisque, s’ils étaient attrapés, la torture, l’exécution ou l’internement dans un camp les attendaient, quel que soit leur rôle. Par leur courage, les résistants ont gêné l’occupation allemande et ont aidé les Alliés dans la libération du pays. Ils sont plus de 30 000 à être atteints par la répression dont la moitié ne reviendront pas.
*VANDENBUSSCHE R. (éd.), L’engagement dans la Résistance (France du Nord - Belgique), Lille, Publications de l’Institut de recherches historiques du Septentrion, 2012, p. 26-30 (Histoire et littérature du Septentrion (IRHiS)). Disponible sur OpenEdition.
**VANDENBUSSCHE R. (éd.), Femmes et Résistance en Belgique et en zone interdite, Lille, Publications de l’Institut de recherches historiques du Septentrion, 2018, p. 225-244 (Histoire et littérature du Septentrion (IRHiS)).Disponible sur OpenEdition.