La Stasi
Le ministère de la Sécurité d’État, plus connu sous le nom de « Stasi », est une institution mise en place par le parti socialiste unifié d'Allemagne (SED) en février 1950 et dissoute en janvier 1990. Elle se base sur le modèle soviétique et adopte la structure militaire de la Tchéka, ancêtre du comité pour la sécurité de l’État (KGB). Son organisation devient de plus en plus complexe au fur et à mesure de son développement. Au début, la Stasi a pour vocation d’épurer le SED et a donc pour mission de surveiller le parti tout en étant directement sous ses ordres. Les membres de cette institution sont mus par une vision idéologique inébranlable et considèrent les personnes n’adhérant pas à celle-ci comme des ennemis de l’État. Cette idéologie les pousse à vouloir contrôler l’ensemble de la population de la République démocratique allemande, bien que cela se révèle impossible, même pour le meilleur service d’espionnage du monde. Cette volonté de contrôle est motivée par la conviction de l’existence d’un combat contre les capitalistes impérialistes représentés d’abord par la République fédérale d'Allemagne (RFA), puis par les USA et les autres pays du bloc de l’Ouest.
Dans un premier temps, le ministère met surtout en place des actions au niveau national. Sa première mission est de purger le SED afin d’en faire un parti basé sur le modèle soviétique. Tous les opposants au nouveau régime et au parti se trouvent sous la menace de la Stasi. Ses agents surveillent plus particulièrement les personnes qui se trouvaient en Allemagne de l’Ouest durant la guerre. Ils instaurent une véritable chasse contre les opposants au communisme et les militants issus d’Allemagne de l’Ouest. Ces initiatives les amènent à créer des fiches de renseignements sur une grande partie de la population est-allemande : la Stasi devient ainsi une véritable police politique secrète dont la mission est de surveiller la population pour protéger le régime contre toute attaque. Dans le même temps, le ministère de la Sécurité d’État développe sa deuxième mission en posant les bases de son activité d’espionnage en RFA, son principal ennemi. De nos jours, plusieurs films mettent en scène le travail de la Stasi: La vie des autres de Florian Henckel von Donnersmarck (2006) en est un parfait exemple.
En 1951, la Stasi crée la Hauptverwaltung Aufklärung (HVA), une unité chargée du renseignement extérieur qui a pour fonction le renseignement politique, militaire, économique et technologique, mais aussi l'infiltration des structures des institutions occidentales. Cette unité se dissimule sous le nom « d’institut de recherche des sciences économiques ». Un an plus tard, Markus Wolf prend la direction du ministère de la Sûreté d'État ; il occupera ce poste jusqu’en 1986. Il fait passer l’unité HVA à un niveau supérieur et la fait connaitre dans le monde entier grâce à ses méthodes d’espionnage. Parmi ces dernières se trouve l’utilisation d’agents dits « Roméo » dont la mission est de séduire les secrétaires des institutions occidentales afin de les amener à travailler pour eux en leur fournissant des informations. Markus Wolf est également connu pour son implication dans « l’affaire Guillaume », laquelle a révélé l'infiltration d’un de ses agents dans le cercle rapproché du chancelier de la RFA, Willy Brandt. Cet agent démasqué, Willy Brandt démissionne de son poste (1974). Il s'agit de l’affaire d’espionnage la plus marquante de la RFA qui, sous la direction de Wolf, est la cible privilégiée de la Stasi : dès lors, la majorité de ses départements se concentre sur le voisin ouest-allemand. Cette situation crée des conflits avec le KGB qui exige que la Stasi ait des agents dans le monde entier. En effet, les agents du HVA sont considérés comme l’élite du ministère. Leur recrutement est extrêmement strict aux plans idéologique et intellectuel : il faut posséder un diplôme universitaire, connaitre plusieurs langues et être investi dans son travail pour la Stasi.
Après la dissolution du ministère de la Sûreté d'État en 1990, ses employés tentent de détruire des documents, mais ils font face à la colère de la population qui occupe les bâtiments et les prisons de la Stasi à Berlin. Après la réunification allemande, il est décidé d’ouvrir les dossiers de la Stasi : de nombreux Allemands peuvent ainsi consulter leur fiche d’information personnelle. De plus, les anciens informateurs du ministère sont pourchassés et les documents détruits reconstitués au cours des années 1990. De nos jours, de nombreux bâtiments anciennement rattachés ou associés à la Stasi sont devenus des lieux de mémoire ou des musées, comme son quartier général berlinois ou encore la prison de Berlin-Hohenschönhausen.