Bruxelles, haut lieu d'espionnage
De nos jours, Bruxelles est considérée comme la capitale de l’Union européenne (UE) et est, de ce fait, un haut lieu de la politique internationale. Dans les années 1970, Bruxelles possédait déjà ce statut particulier avec plusieurs institutions internationales : la CEE (ancêtre de l'UE) et aussi l'OTAN. Dès lors, il n'est pas étonnant que la ville fut la cible des espions.
Dès la fin des années 1950, Bruxelles accueille les institutions européennes sans pour autant bénéficier du statut officiel de capitale de l'Europe faute d’accord entre les pays membres. En 1965, après plusieurs années de négociations infructueuses, un statu quo est adopté : à Bruxelles se trouvent la Commission européenne et ses départements ainsi que le Conseil européen. Quant au parlement, il se répartit entre Bruxelles et Strasbourg ; la cour de justice est à Luxembourg.
En ce qui concerne l'OTAN, son quartier général, qui se trouvait à Paris jusqu’en décembre 1966, déménage à Bruxelles tandis que le Grand Quartier général des puissances alliées en Europe (SHAPE) s'installe près de Mons. Ce déménagement résulte de la décision du président Charles de Gaulle de quitter l’OTAN. La Belgique devient, dès lors, le centre de commandement politique et militaire du bloc de l’Ouest.
Une telle concentration d’institutions internationales fait de Bruxelles une cible privilégiée pour les espions de différents pays, dont ceux de la Stasi. Les tentatives des services secrets visant à infiltrer ces institutions se multiplient.
Une autre raison place Bruxelles comme cible de choix pour la République démocratique allemande. Parmi les pays de l’alliance atlantique, la Belgique est le plus enclin à entretenir des relations cordiales avec l’Allemagne de l’Est. Elle est d’ailleurs le premier pays du bloc de l’Ouest à établir des relations diplomatiques avec la RDA et à la reconnaitre officiellement à la fin de l’année 1972.
Suite à cette reconnaissance, la République démocratique allemande ouvre une ambassade à Bruxelles début 1973. Cette dernière devient la base du commandement des activités d’espionnage en Belgique. Dans les archives de la Stasi, elle est désignée comme la Residentur 211.
L’ambassade est-allemande à Bruxelles communique de manière cryptée les informations recueillies par les espions et les « indics ». D'autres types d'agents envoyés par la Stasi y travaillent : ils coordonnent les missions d’espionnage, mais en tant que membres du corps diplomatique ils nouent également des relations avec des diplomates belges et étrangers afin d’obtenir oralement de nombreuses informations. Ces pratiques seront illustrées ci-dessous avec le cas de l'agent Kurt Berliner.
Le système d'espionnage orchestré au sein de l'ambassade de la RDA a fonctionné jusqu’à la dissolution de la Stasi, et ce malgré la surveillance des ambassades des pays socialistes par la Sûreté de l’État belge.